20 août 2013, 10:26
La
FGTB est un syndicat socialiste belge. Si dans ses statuts, il appelle à
la fin du capitalisme et à l'avènement du socialisme, ses positions
effectives sont souvent moins réalistes.
Je vous propose l'exégèse d'un tract dont le dessin se trouve ci-dessous, d'un appel à manifester, de juin dernier.
La couleur est rouge, la lettrine blanche et noire. Nous sommes dans les couleurs les plus fréquentes en politique, des couleurs pour ainsi dire perceptibles par des daltoniens. Il s'agit d'ameuter, d'alerter, d'attirer l'attention. La cause est une manifestation. C'est le but ultime, l'objet du message: les seuls caractères noirs du message rédigé en blanc. Pour parvenir à ce qui est présenté comme un but, on nous présente une série d'arguments, de raisons, de motifs.
Ces arguments dessinent une vision du monde clivée en paradis-enfer. Le paradis est valorisé par le biais des revendications; il s'agit de justice fiscale, de salaire, de relance de l'emploi, de taxer les gros revenus, les revenus du capital et de lutte contre la fraude fiscale, de protection contre le licenciement et d'harmonisation vers le hauts (ouvrier vs employé, deux statuts différents en Belgique).
Le message signifie surtout par les connexions qu'il opère. Les revendications sont connues depuis longtemps dans le milieu syndicaliste de gauche, elles font l'objet d'un consensus. Par contre, ces mesures sont réclamées depuis des décennies (au moins), elles n'ont jamais fait l'objet de lutte politique syndicale spécifique et demeurent quasiment absentes du champ politique. En liant des revendications nouvelles, légitimes, liées à une situation actuelle à des arlésiennes, tes TOC syndicaux, on distille l'idée de l'inanité des revendications paradisiaques, on induit l'idée que ces revendications ne vont jamais aboutir.
Mais il y a mieux, le pouvoir d'achat, la justice (fiscale, c'est-à-dire une justice qui n'est pas simplement juste mais simplement fiscale), l'emploi sont mis ensemble. L'emploi est donc assimilé à un désirable, à la justice (fiscale), à l'objet des revendications légitimes. Ceci est doublé subtilement par l'appel à la protection contre le licenciement. Bref, l'emploi est légitime, souhaitable, il est la solution. Il faut garantir la protection contre la perte d'emploi. Donc la perte d'emploi est un dol, une souffrance, une catastrophe. Pourquoi alors interdire un tel bonheur aux enfants, aux malades ou aux personnes âgées - ce syndicat est défavorable au recul de l'âge de la retraite ou au travail des enfants ?
Passons et examinons maintenant l'enfer. L'enfer, c'est le gel des salaires individuels - il n'est nulle part question des salaires sociaux scandaleusement amputés en Belgique par la multiplication des dérogation, des contrats en sous-statuts sans cotisation sociale. L'enfer, c'est l'austérité (mais ils n'expliquent pas ce qu'est l'austérité) qui provoque pauvreté et inégalité. Il faut donc être égaux et riches pour éviter l'enfer et passer par l'emploi pour être au paradis revendiqué. Le bonheur de la FGTB, c'est donc un emploi avec du pouvoir d'achat pour tous. Au fond, si on était tous des traders à Wall Street, nous nagerions en pleine félicité et nous pourrions - dans un monde idéal - payer des taxes! Nous serions alors pleins de pouvoir d'achat, bons et surtout, solidaires. Par contre, si je puis me permettre, nous n'oeuvrerions pas à l'avènement du socialisme ou au dépassement du capitalisme.
Inutile de dire que la posture de la FGTB
- la fait passer pour un looser quand elle assimile ses revendications nouvelles à des revendications anciennes qui n'ont jamais eu d'écho
- la met sur le terrain de l'ennemi quand la FGTB demande de l'emploi: l'emploi est un profit pour le patron et un dol pour l'ouvrier et l'employé (à ce niveau-là, les statuts sont déjà harmonisés). En se mettant sur le terrain de l'ennemi patronal, un syndicat se condamne à l'impuissance velléitaire puisqu'elle combat dans les termes et sur le terrain définis par les patrons.
A moins que ce ne soit le but: manifester (en noir), alors que cette organisation compte plus d'un million de membres dans un pays de 11 millions d'habitants et pourrait sans problème organiser des grèves au finish avec des revendications appétissantes - je veux dire pour les plus gloutons d'entre nous.
Je vous propose l'exégèse d'un tract dont le dessin se trouve ci-dessous, d'un appel à manifester, de juin dernier.
La couleur est rouge, la lettrine blanche et noire. Nous sommes dans les couleurs les plus fréquentes en politique, des couleurs pour ainsi dire perceptibles par des daltoniens. Il s'agit d'ameuter, d'alerter, d'attirer l'attention. La cause est une manifestation. C'est le but ultime, l'objet du message: les seuls caractères noirs du message rédigé en blanc. Pour parvenir à ce qui est présenté comme un but, on nous présente une série d'arguments, de raisons, de motifs.
Ces arguments dessinent une vision du monde clivée en paradis-enfer. Le paradis est valorisé par le biais des revendications; il s'agit de justice fiscale, de salaire, de relance de l'emploi, de taxer les gros revenus, les revenus du capital et de lutte contre la fraude fiscale, de protection contre le licenciement et d'harmonisation vers le hauts (ouvrier vs employé, deux statuts différents en Belgique).
Le message signifie surtout par les connexions qu'il opère. Les revendications sont connues depuis longtemps dans le milieu syndicaliste de gauche, elles font l'objet d'un consensus. Par contre, ces mesures sont réclamées depuis des décennies (au moins), elles n'ont jamais fait l'objet de lutte politique syndicale spécifique et demeurent quasiment absentes du champ politique. En liant des revendications nouvelles, légitimes, liées à une situation actuelle à des arlésiennes, tes TOC syndicaux, on distille l'idée de l'inanité des revendications paradisiaques, on induit l'idée que ces revendications ne vont jamais aboutir.
Mais il y a mieux, le pouvoir d'achat, la justice (fiscale, c'est-à-dire une justice qui n'est pas simplement juste mais simplement fiscale), l'emploi sont mis ensemble. L'emploi est donc assimilé à un désirable, à la justice (fiscale), à l'objet des revendications légitimes. Ceci est doublé subtilement par l'appel à la protection contre le licenciement. Bref, l'emploi est légitime, souhaitable, il est la solution. Il faut garantir la protection contre la perte d'emploi. Donc la perte d'emploi est un dol, une souffrance, une catastrophe. Pourquoi alors interdire un tel bonheur aux enfants, aux malades ou aux personnes âgées - ce syndicat est défavorable au recul de l'âge de la retraite ou au travail des enfants ?
Passons et examinons maintenant l'enfer. L'enfer, c'est le gel des salaires individuels - il n'est nulle part question des salaires sociaux scandaleusement amputés en Belgique par la multiplication des dérogation, des contrats en sous-statuts sans cotisation sociale. L'enfer, c'est l'austérité (mais ils n'expliquent pas ce qu'est l'austérité) qui provoque pauvreté et inégalité. Il faut donc être égaux et riches pour éviter l'enfer et passer par l'emploi pour être au paradis revendiqué. Le bonheur de la FGTB, c'est donc un emploi avec du pouvoir d'achat pour tous. Au fond, si on était tous des traders à Wall Street, nous nagerions en pleine félicité et nous pourrions - dans un monde idéal - payer des taxes! Nous serions alors pleins de pouvoir d'achat, bons et surtout, solidaires. Par contre, si je puis me permettre, nous n'oeuvrerions pas à l'avènement du socialisme ou au dépassement du capitalisme.
Inutile de dire que la posture de la FGTB
- la fait passer pour un looser quand elle assimile ses revendications nouvelles à des revendications anciennes qui n'ont jamais eu d'écho
- la met sur le terrain de l'ennemi quand la FGTB demande de l'emploi: l'emploi est un profit pour le patron et un dol pour l'ouvrier et l'employé (à ce niveau-là, les statuts sont déjà harmonisés). En se mettant sur le terrain de l'ennemi patronal, un syndicat se condamne à l'impuissance velléitaire puisqu'elle combat dans les termes et sur le terrain définis par les patrons.
A moins que ce ne soit le but: manifester (en noir), alors que cette organisation compte plus d'un million de membres dans un pays de 11 millions d'habitants et pourrait sans problème organiser des grèves au finish avec des revendications appétissantes - je veux dire pour les plus gloutons d'entre nous.