Imaginez

Imaginez

Imaginez un pays où ceux qui gouvernent ne sont pas élus et ne le seront jamais

Imaginez un pays où il faut toujours obéir à un gouvernement tout-puissant sous peine de bannissement

Imaginez un pays où le gouvernement décide quand vous pouvez aller à la toilette, ce que vous pouvez faire et ne pas faire,

Imaginez un pays où les gouvernants utilisent le racisme comme méthode de gouvernement, la censure et la propagande comme mode de communication,

Imaginez un pays où les plus brillants sont rabroués ou voués à de viles tâches vénales,

Imaginez un pays où le sexisme est une pratique officieuse mais universelle,

Imaginez un pays où n'existent ni liberté de conscience, ni liberté d'action, ni liberté religieuse ou philosophique,

Imaginez un pays où il faut toujours marquer son accord envers le gouvernement, envers ses pratiques et envers sa légitimité, en public, bien sûr, mais même dans le secret de l'intimité

Imaginez un pays où les opinions contre le gouvernement sont punies de bannissement

Imaginez un pays où les chefs, où le gouvernement ont le droit de vous bannir, à tous moments,

Imaginez un pays où le gouvernement s'amuse à dresser les gens les uns contre les autres, dans une guerre fratricide interminable,

Imaginez un pays où la liberté d'association est très encadrée par le gouvernement, un pays où l'on ne fonde pas une famille sans l'accord (tacite) du gouvernement, un pays où le gouvernement peut décider de vous bannir parce que vous avez un enfant,

Imaginez un pays où la sécurité n'est pas garantie, un pays où vos ressentis, votre vie n'ont absolument aucune importance pour le gouvernement

Imaginez un pays où les habitants doivent dire "merci" au gouvernement tant qu'ils sont tolérés dans ce pays

Imaginez un pays où le gouvernement décide ce que vous faites, comment vous le faites, avec qui vous le faites et dans quels buts vous le faites, imaginez un pays où ce que vous faites appartient au gouvernement.

Quel est ce pays, me direz-vous? C'est votre entreprise. Et qui est le gouvernement? Ce sont les propriétaires lucratifs de votre entreprise.

Bienvenue en emploi.

Lettre aux actionnaires

Cet article est disponible en PDF ici

(Extrêmement) chers actionnaires,

Vous touchez de l'argent en plaçant de l'argent. Cela vous paraît légitime, normal. Après tout, vous achetez des actions, des titres, des bons, des produits dérivés et, années après années, vous encaissez des dividendes, des plus-value. Tout cela vous paraît éminemment normal. Vous êtes payés parce que vous détenez des titres, parce que vous êtes propriétaire lucratif.

Vous détenez des titres, des avoirs que vous entendez "valoriser" parce que vous pensez que vous les méritez, que vous pourrez assurez vos vieux jours (ou ceux de vos descendants) comme cela. Bien sûr, le souvenir des krachs boursiers vous hante de temps en temps mais, avec des institutions publiques aussi solides que celles qui interviennent sur les places boursières, vous vous dites que vous ne risquez pas grand chose. Finalement, ce sont les institutions publiques qui vous rassurent sur l'existence de vos titres de propriété. Mais les institutions publiques sont rincées: elles ont payé les institutions privées que la loi du profit, la loi de la propriété lucrative justement, cette loi qui vous trouvez absolument normale, avait menées au néant.

Cela vous paraît peut-être tout aussi normal mais, dans les entreprises que vous détenez, ce ne sont pas les travailleurs qui décident ce qui est fait, comment c'est fait, par qui c'est fait, ce sont vos intérêts financier qui déterminent la nature de l'activité, ceux qui la mènent et comment elle est menée. Les travailleurs sont qualifiés, compétents, souvent intéressés par ce qu'ils font mais c'est vous, actionnaire en tant qu'être anonyme qui engrangez des profits qui n'y connaissez a priori pas grand chose, qui décidez. C'est la loi qui régit l'activité: le propriétaire lucratif, l'actionnaire décide de ce qui se fait et comment. Vous aurez remarqué que cette loi est protégée par un appareil d'État en déliquescence (parce que la dette de l'État fonctionne selon cette même loi: les créanciers décident de l'activité de l'État).

Quand une entreprise cherche à faire des bénéfices pour rémunérer les actionnaires, les propriétaires lucratifs, les créanciers, elle essaie de faire des économies en comprimant les salaires - ce qui, à un niveau macro-économique, sape la demande, la possibilité pour les entreprises de vendre leurs bidules puisque les clients-salariés se retrouvent sans argent quand toutes les entreprises compriment les salaires - ou en externalisant les coûts sociaux, environnementaux ou financiers. Externaliser, c'est faire payer par d'autres les coûts de l'activité dont on retire un bénéfice. L'externalisation est très anti-libérale mais c'est pourtant l'une des principales conséquences de la loi de la propriété lucrative, du profit.


Et puis, il y a bien quelque petits problèmes à cette loi de la propriété lucrative qui vous paraît pourtant si naturelle, si normale. Le chômage s'étend, les emplois s'apparentent de plus en plus à une insulte à la dignité humaine (voyez vos petits enfants, vos amis d'enfance ...), les ressources naturelles dont les humains ont besoin s'épuisent, la qualité des marchandises se dégrade, le discours publicitaire, vulgaire et tapageur, sature l'espace public. Ce sont là des inconvénients mineurs, me direz-vous, mais ces inconvénients sont directement liés à cette loi du profit, à cette loi de la propriété lucrative que vous trouvez si naturelle.

Alors me direz-vous, au bout de ce bref inventaire, cette loi du profit, de la propriété lucrative, a certes quelques menus défauts mais elle vous permet de continuer à payer vos factures, elle vous permet de dépenser votre argent dans des dépenses somptuaires qui vont donner de l'emploi aux gens sans argent. C'est la théorie du trickle down, du ruissellement: l'enrichissement des riches enrichit les pauvres. Cette belle théorie ne s'est jamais vérifiée - pour enrichir les pauvres, il a toujours fallu appauvrir les riches et les pauvres ne se sont jamais enrichis parce que les riches devenaient plus riches - mais cette théorie a l'avantage de faire passer le riche actionnaire qui tire son argent du travail du pauvre pour quelqu'un de bien, pour quelqu'un de bon, pour quelqu'un d'utile. Mais, vous savez, vous pouvez devenir quelqu'un de bon, d'utile si vous valorisez non vos misérables titres de propriété mais vos aptitudes, votre soif de la vie, votre capacité à aider votre prochain, à inventer, à découvrir, à devenir.

On peut même expliquer pourquoi la théorie du ruissellement n'a jamais fonctionné: les pauvres dépensent tout leur argent alors que les riches accumulent le leur à l'infini. C'est dire que l'argent gagné par les pauvres, les salaires, retourne immédiatement dans l'économie alors que l'argent des riches est retiré de l'économie et remplit des comptes off-shore qui ne servent pas à grand monde.

Cette loi vous permet donc de gagner de l'argent et de le retirer de l'économie en pourrissant les ressources dont vous avez besoin, en sapant les bases de l'État qui protège votre propriété lucrative, en dégradant au passage les infrastructures publiques, le niveau de formation des travailleurs, la qualité des marchandises, etc.

C'est une loi qui risque de ne pas vous nourrir longtemps. Si cette loi ramène l'Europe à l'âge de la pierre, vos titres, vos avoirs, vos actions, vos lingots, vos obligations n'auront plus le moindre sens. Avec ces tas de papier, avec ces tas d'or, vous ne pourrez pas vous nourrir, vous ne pourrez pas vous chauffer, vous ne pourrez pas vous loger. Vous me direz que l'apocalypse économique ne vous touchera pas vous directement. Effectivement, l'apocalypse économique est une quasi certitude si l'on ne touche pas à la loi du profit, de la propriété lucrative, mais elle ne vous touchera peut-être pas directement. Elle touchera vos enfants.

Cette loi que vous croyez normale, naturelle, cette loi de la propriété lucrative est humaine. Elle a un coût démesuré par rapport à ses bénéfices. Par contre, la question de la permanence de vos revenus, de la certitude d'avoir de l'argent pour vos vieux jours est une vraie question. C'est une vraie question, une vraie angoisse que la propriété lucrative, que cette loi humaine d'airain, ne résout pas. Ce qui apaise cette peur lancinante du lendemain, c'est la société, c'est le politique, c'est le vivre ensemble. Demain, d'autres humains produiront, travailleront, laboureront, inventeront, créeront, fabriqueront ce qu'il faut pour tous. Il s'agit de traduire cette solidarité de société, il s'agit de traduire le social et le politique dans l'économique. Il faut que l'économique soit traduit en termes sociaux et politiques qui permettent à chacun de mener librement ses activités et de rencontrer ses besoins.

Dans le royaume de la propriété lucrative, quand vous serez âgé, vous serez parqué dans une maison de retraite. Dans cette maison de retraite, les actionnaires auront tout pouvoir. Les frais de personnel seront donc réduits. Le personnel n'aura, par exemple, pas le temps de s'occuper de vous, il vous laissera sans vous changer pendant des heures si vous faites vos besoins dessus, il devra adapter vos horaires à la rapidité des actes à poser. Bref, riche ou pauvre, en maison de retraite sociale ou en maison pour milliardaires, vous serez maltraités. Pour être bien traité quand vous serez en maison de repos, il faut que les travailleurs soient libres de vous consacrer le temps dont vous aurez besoin. Il faut qu'ils ne soient pas contraints de produire du profit en travaillant au plus vite.

Si vous ne voulez pas être maltraités pendant vos vieux jours, si vous voulez aussi que vos enfants aient le temps de venir vous voir, qu'ils ne soient pas mis sous pression par un employeur chronophage qui cherche le retour sur investissement, il serait bon de remettre en cause cette loi que vous trouvez peut-être encore si normale, si naturelle, la loi de la propriété lucrative.

Mais, ne vous inquiétez pas, tout n'est pas perdu, pour la mise en cause de la propriété lucrative, nous regorgeons d'idées.

Les enjeux des nouvelles technologies

Pour mémoire, nous relayons un article de Rue 89 (ici, en libre accès) sur les enjeux syndicaux du secteur des nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC).

Résumé des 12 travaux

1. Pénétrer les lieux de travail impénétrable du genre du bunker d'Amazon

2. Dépasser (et saboter) le management à la cool - il est difficile de lutter contre son copain.

3. Déconnecter les bidules en ligne après le temps d'emploi

4. Reconnaître et encadrer le digital labor, le moindre des gestes sur la toile génère de la plus-value

5. Développer l'emploi dans le secteur [sur ce point nous ne partageons évidemment pas le point de vue de Rue 89]

6. Encadrer la surveillance des employés par les données électroniques (voir l'exemple caricatural des centres d'appel)

7. Faire payer les impôts par les géants du secteur [et les cotisations sociales!]

8. Dépasser l'individualisme culturel

9. Inscrire une action collective dans des contrats individualisés, au projet

10. Adapter les actions et les perspectives à l'automatisation

11. Entrer dans les start-up hyper-connectées, sans culture de lutte

12. Dépasser l'atomisation du télé-travail

Les signes du burn-out

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Le burn-out est une maladie dangereuse qui peut engager le pronostic vital. Dans le cadre de l'emploi, elle est souvent directement provoquée par l'impératif de profit de la propriété lucrative.

Voici des signes auxquels il faut être attentifs pour dépister le burn-out chez vous, chez un collègue, chez un ami ou un parent. Les chômeurs sont également harcelés et mis sous pression par l'administration. Ils peuvent donc également développer cette maladie (l'emploi pourrit même ceux qui n'en ont pas).

http://www.rtl.fr/culture/bien-etre/burn-out-6-signes-qui-doivent-alerter-7777371586

Résumé:
Armelle Gautier identifie six signes de burn-out (voir l'article de Rtl de Johanna Anselem ici):

1. Intense fatigue
"La plupart du temps ils ne comprennent pas ce qui leur arrivent. Ceux qui sont le plus susceptible de souffrir de burn-out sont des personnes extrêmement actives, très impliquées au travail, qui sont souvent en suractivité"
2. Isolement des autres
"Ils n’ont plus de contrôle sur leurs tâches et leurs activités professionnelles et ressentent une extrême solitude".
3. Signes du corps
"Physiquement, il est fréquent de ressentir des problèmes gastriques comme des crampes d’estomac ou des remontées acides. De plus, les personnes souffrent souvent de troubles du sommeil et, dans certains cas, de troubles alimentaires. Les défenses immunitaires s’affaiblissent et les épisodes inflammatoires se multiplient, comme les angines. Le burn-out peut aussi déclencher des tensions musculaires comme des torticolis ou un mal de dos"
4. Cynisme
Ceux qui en souffrent développent souvent du cynisme vis-à-vis de leur travail. Ainsi, un professionnel de soins ne se souciera plus de ses patients, un enseignant se désintéressera de ses élèves et un agriculteur ne s’occupera plus de son exploitation. Une personne qui souffre se désintéresse de son environnement et de ses activités habituelles. Elle ressent un sentiment d’échec, adopte une attitude distante et voit les choses du côté négatif.
5. Trouble des facultés cognitives
"Il n’est pas rare aussi que les personnes touchées éprouvent des difficultés à fixer leur attention sur quelque chose, à lire et à écrire. Par contre, les activités manuelles sont moins affectées et offrent la possibilité de conserver le sentiment de pouvoir agir sur les choses".
6. Baisse de l'estime de soi
"Les personnes ont la sensation d’avoir échoué dans ce qui leur tenait le plus à cœur et d’être totalement inutiles au monde et aux autres.
"Elles ne ressentent plus rien. Comme si elles étaient anesthésiées, incapables d'éprouver aussi bien de la joie que de la douleur".