- Histoire
L’histoire a profondément marqué les rapports sociaux et les structures productives de l’Afrique du Sud contemporaine. Le rapport salarial a été remodelé continuellement par les conflits sociaux qu’a connus le pays depuis la fin du xixe siècle. Ainsi, comme le note Makgetla, en entretenant une situation de sous-emploi et de chômage structurels, le régime d’apartheid (et avant lui, le régime colonial britannique puis sud-africain) a volontairement affaibli la position des Noirs aussi bien comme capitalistes que comme travailleurs. Ceci a permis de protéger la position socio-économique de l’ensemble des Blancs (notamment les plus pauvres et les moins éduqués) tout en offrant aux entreprises une main-d’œuvre noire bon marché et docile, issue d’une « armée de réserve » appauvrie et prête à accepter n’importe quel emploi.La division des producteurs en race permet de les mettre en concurrence, ce qui met au chômage le groupe majoritaire faute de qualification et met sous pression le groupe minoritaire.
Cette division se manifestait notamment par le fait que
la panoplie de droits dont bénéficiaient les ouvriers blancs (droit syndical, sécurité sociale et assurance-maladie, fonds d’assurance chômage, accès aux tribunaux de travail, etc.) contrastait avec les efforts de l’État pour affaiblir les ouvriers africains, tant par la subversion de leurs organisations que par des attaques directes.L'Industrial Conciliation Act signé sous la pression des violentes grèves de 1973 et l'élection de l'African National Congress (ANC) en 1994 allaient permettre les espoirs les plus optimistes.
Deux ans plus tard, en 1997, le Basic Conditions of Employment Act (BCEA) définit précisément l’employé(e) en incluant tous les travailleurs (excepté les indépendants) et encadre le temps de travail (45 heures par semaine, 21 jours de congés par an, congés maladies, etc.). Si certaines mesures concernent tous les secteurs d’activités (cotisations chômage et indemnités de licenciement par exemple), d’autres formes de protection sociale (fonds de pension et assurances diverses) relèvent toujours d’accords négociés au sein de l’entreprise ou de la branche. C’est pour cette raison que le BCEA prévoit un mécanisme permettant au ministre du Travail d’intervenir pour fixer les conditions de rémunération dans un secteur donné si les ouvriers sont insuffisamment syndiqués pour négocier avec les employeurs.
- Situation
En dépit de cette législation très progressiste, très favorable aux producteurs, elle n'a pu améliorer le sort des plus pauvres et a été contrecarrée par plusieurs éléments.
- Le secteur minier a été libéralisé, ce qui a permis le recours à une main d’œuvre 'externalisée', informelle, exclue du droit du travail
- Le secteur forestier mis sous pression par les papeteries clientes a eu recours à de la sous-traitances en cascade jusqu'à l'informel, hors du droit du travail. Il a eu recours à des étrangers, des Zimbabwéens ou des Swazilandais pour travailler en dehors de la loi
- Le secteur agricole, contexte
Après la migration des Boers (le « Grand Trek ») au xixe siècle et l’appropriation de la plus grande partie des terres par les colons, nombreux étaient les ménages non blancs résidant en fermage ou en métayage sur les terres des agriculteurs blancs. Selon Van Onselen, certains de ces métayers étaient parvenus à développer une activité agricole productive et rentableCes agriculteurs noirs ont été expulsés de leurs terres par l'apartheid. Par millions, ils ont été poussés vers les industries et n'ont pu se syndiquer quand ils sont devenus des ouvriers agricoles.
Les expulsions se poursuivent et les lois ne sont pas respectées.
Mais les lois destinées à protéger les ouvriers agricoles ne sont que rarement appliquées. Les expulsions continuent, voire s’accélèrent. La Nkuzi Development Association estime qu’environ 930 000 salariés agricoles ont été expulsés depuis 1994, soit 13 % de plus que pendant les dix années précédant les élections démocratiques. Selon O’Keeffe, citant une étude de Social Surveys Africa réalisée en 2005, il y a eu 199 611 ménages expulsés de leurs terres pour 164 185 ménages ayant bénéficié des programmes de réforme foncière durant les dix premières années post-apartheid.La démocratie post-apartheid a ouvert de grands espoirs mais la violence des relations sociales du travail a perduré et le virage de 1996 de libéralisation de l'économie aura été fatal aux espoirs d'émancipation.