Petites nouvelles des usines récupérées en Argentine

Traduction et résumé de cet article en anglais (Resilience):

Dix ans après la Prise: reportage dans des usines argentines possédées par leurs travailleurs



 L'économie argentine est confrontée à l'inflation actuellement. Il est difficile d'y mener des affaires vu le manque de transparence des transactions monétaires. Cela rend la multiplication des entreprises possédées par les travailleurs d'autant plus remarquable. Le reporter, jeune étudiant activiste a voulu évaluer la méthode de résistance, il a voulu voir si elle était applicable à grande échelle.

Le mouvement de réappropriation a commencé lors de la crise économique en 2001. Les investisseurs étrangers fermaient alors les usines qui demandaient des millions d'emplois. Certains travailleurs ont continué à occuper leur poste de travail - ils en étaient capables -, à occuper leurs usines et à demander le droit de travailler, de redémarrer la production en tant que coopérative ouvrière. Ce mouvement a concerné plus de 180 coopératives employant plus de 10 mille travailleurs. L'idée était de garder la valeur ajoutée produite par leur usine dans leurs affaires et plus de l'emmener sous d'autres cieux. Pendant des mois, ils ont dû garder leur matériel, leurs usines pour empêcher les anciens propriétaires de saisir le matériel et de le revendre. Ces occupations ont été réprimées violemment par la police au début.

Ce moment a donné l'espoir à des travailleurs dans le monde entier, il a été résumé par The Take, sous-titré en français, le film de Naomi Klein. Ces usines après onze ans sont en voie d'institutionnalisation, elles accèdent aux marchés majoritaires. Témoignages.

À la Matanza, on est confrontés à de très vieux problèmes et on trouve de nouvelles solutions. Cette usine à écrou occupée depuis 2003 est gérée par neufs 'socios' (associés), la plupart âgé de soixante ans. Ils prennent des décisions horizontales, de manière collective avec les gens avec qui ils ont travaillé pendant longtemps.

Les affaires vont bien avec une clientèle stable et un 'retour' (ils n'appellent pas cela des salaires dans la coopérative) plus élevé que la moyenne. Leur travail est assuré mais, quand il y a une panne de machine, les retards peuvent s'accumuler: le matériel vieillit. D'autre part, certains travailleurs ont passé plus de temps dans ces entrepôts sombres qu'avec leur famille. L'usine a son prix.

À la SG Patria Grande, les travailleurs sont jeunes, ils sifflent dans une lumière brillante. La coopérative rêve d'utiliser une partie des fonds de leur distribution pour ouvrir une épicerie-restaurant d'aliments produits de manière responsable. L'entreprise d'emballage vit des déchets mais essaie d'offrir des produits à base de maïs.

L'ambiance est militante, on travaille réseaux courts, échanges, alternatives.

Mise en perspective:

Nous nous réjouissons de cette fenêtre hors de l'emploi traditionnel. Elle permet le travail hors exploitation, hors de la pression des actionnaires. C'est formidable mais la question à laquelle cet enthousiaste article ne répond qu'imparfaitement, c'est celle de la concurrence entre producteurs, c'est la question de savoir si, en dépit du mode de gestion en coopérative horizontale, les pratiques professionnelles ne doivent pas s'aligner sur celles de la concurrence, si les travailleurs ne se retrouvent pas à travailler dans des conditions aussi pénibles qu'auparavant, sans patron. La question, une fois l'usine réappropriée, est celle de l'effet de la concurrence sur les pratiques au travail.

En tout cas, la piste des coopératives est intéressante. À une échelle individuelle, on remarquera que les indépendants ne s'affranchissent pas de la logique de l'emploi: ils demeurent sous la pression de la concurrence, doivent donc produire plus vite, à moindre coût, ils doivent eux-mêmes organiser leurs tâches pour qu'elles soient plus efficaces en temps. Ils se retrouvent malgré eux corsetés dans le même type d'activité que les ouvriers.