Diminution du temps d'emploi

En Suède, selon 7sur7 (ici, en français), se mène une expérience pilote de réduction du temps d'emploi.

De prime abord, à l'heure où les heures supplémentaires contraintes gratuites se multiplient, on peut s'interroger sur la possibilité de contrôle effectif du temps de travail - surtout quand l'inspection du travail est notoirement sous-financée.

Évidemment, comme l'emploi est une mauvaise chose, on ne peut que se réjouir de la diminution du temps qu'on y consacre (cette diminution augmente d'ailleurs l'efficacité du travail presté pendant ce temps, elle augmente la productivité et ne constitue en rien une concession des propriétaires lucratifs) mais cette diminution du temps d'emploi a un effet pernicieux: elle fait croire que l'emploi peut-être supportable, que c'est une violence "nécessaire mais qu'on peut diminuer" alors que nous sommes convaincus que l'emploi n'est pas une violence nécessaire mais une violence absolument contre-productive. Nous croyons que le travail doit être libre (comme le sont les élections, par exemple), libéré du joug de l'emploi et que une heure d'emploi par an, c'est encore une heure de trop.

Par ailleurs, il est piquant que l'exemple "réussi" de diminution de temps d'emploi donné par l'article est surtout un exemple ... d'augmentation de salaire.

Extraits

La Suède expérimente la journée de six heures, payée au même tarif qu'une journée de huit heures, afin de voir si cela permet de faire des économies, avec moins d'arrêts-maladie par exemple.
(...)

Le rythme de travail en Suède surprend souvent les visiteurs étrangers, perplexes sur la possibilité de conjuguer salaires élevés avec tant de loisirs. La clé du succès selon les économistes: une main-d'oeuvre productive et bien formée, capable de s'adapter vite aux nouvelles technologies.

(...)

En 2012, le Suédois moyen a travaillé 1.621 heures au total, selon les derniers chiffres publiés par l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCED). C'est plus que les Pays-Bas, royaume du temps partiel, avec 1.381 heures, ou que la France des 35 heures hebdomadaires, avec ses 1.479 heures, mais moins que le Royaume-Uni avec 1.654 heures et les États-Unis avec 1.790 heures."Nous pourrions travailler davantage, c'est un fait", explique Mme Sahlen.

Le moins peut le plus
Pourtant, au contraire, certains Suédois veulent prouver que travailler moins longtemps peut permettre de gagner et produire autant, en accroissant la productivité. La municipalité sociale-démocrate de Göteborg va expérimenter un projet pour travailler moins longtemps avec des fonctionnaires du secteur des soins aux personnes âgées.

Un groupe travaillera six heures par jour, alors qu'un autre continuera à faire les huit heures habituelles. Dans un an, les autorités municipales analyseront les données pour savoir si la journée de six heures permet de faire des économies, avec moins d'arrêts-maladie par exemple, et décidera si l'expérimentation doit être étendue ou pérennisée.

Pour l'instant, l'expérience se limite au secteur public. (...) Travailler moins doit s'accompagner d'une forte productivité pour rester compétitif.

(...)


Pour les défenseurs du projet, des économies seront faites sur le long terme, en ayant des salariés moins souvent malades au fil des ans, et moins fatigués à l'approche de la retraite. M. Pilhem s'appuie sur l'exemple de l'usine Toyota de Göteborg, où la journée de six heures a été mise en place en 2002 afin de mieux rentabiliser ses installations: une équipe du matin cède la place à une autre de l'après-midi sans coupure.

M. Nilsson a constaté qu'une journée de six heures était plus productive car il y a moins de temps perdu. "À chaque fois qu'on prend une pause, il faut 10 ou 15 minutes avant de se remettre au travail, parce qu'on doit reprendre le fil", expose-t-il.

L'efficacité se reflète dans les salaires puisque dans cet atelier, les techniciens comme lui gagnent 29.700 couronnes (3.300 euros) par mois, bien au-delà du salaire moyen ouvrier de 25.100 couronnes en Suède. "Ça été un énorme succès dès le départ", se félicite la directrice du centre de services Toyota, Elisabeth Jonsson. "Nous avons vu les résultats, et ça a bien fonctionné pour le personnel, pour l'entreprise et pour les clients, donc je ne pense pas que nous ayons déjà envisagé d'y mettre un terme", ajoute-t-elle.

Le chiffre du chômage

Toutes nos félicitations aux propriétaires de ce qui fait tourner l'économie: le chômage et l'emploi sont les deux faces d'une même pièce. Le chômage pousse à la baisse les salaires; au nom de l'emploi, on sabre dans les droits sociaux.

Nous rappelons que le chômage en soi n'est absolument pas un problème. Ce qui est un problème, c'est l'accès au travail social, c'est l'accès à l'économique. Ce qui est un problème, c'est le monopole de l'emploi comme forme d'activité légitime à l'heure où il pille la planète, où il laisse les travailleurs exsangues et misérables, où l'obéissance à l'impératif de bénéfices ne fait que nourrir des gens gavés.

Logiquement, alors que toutes les politiques sont axées sur l'emploi (notamment dans les régions où il augmente le plus, en Europe centrale et en Afrique du Nord), c'est le chômage qui augmente et, avec lui, le chantage des propriétaires des outils de production.

C'est vrai que, en passant, la guerre pour l'emploi, contre le salaire et les droits sociaux, la guerre pour le chômage et contre les travailleurs dégonfle les salaires et, ce faisant, vide les carnets de commande. Vieille histoire (voir les crises de 1637, 1720, 1792, 1797, 1810, 1819, 1825, 1836, 1847, 1857, 1866, 1873, 1882, 1890, 1893, 1907, 1923, 1929, 1966, 1971, 1974, 1979, 1980, 1982, 1985, 1987, 1989, 1990, 1992, 1993, 1994, 1997, 1998, 2000, 2001, 2002, 2007, 2009, 2010 - certaines années, il y en a eu plusieurs).

Cette guerre contre les travailleurs, c'est celle de la "compétitivité", de la "libre concurrence". À qui profite le crime?
 
Extraits
 
Environ quatre millions de personnes sont venues grossir les rangs des chômeurs dans le monde en 2013, dont le nombre s'élève désormais à 199,8 millions, selon le rapport annuel sur le travail publié mardi par l'Organisation internationale du travail (OIT), une agence de l'ONU, basée à Genève.
Le taux de chômage en 2013 est "resté largement inchangé à 6%" de la population active, a ajouté le rapport, qui relève cependant que 90% des nouveaux emplois dans le monde seront créés dans les pays en développement à moyen-terme.
(...)

30,6 millions depuis la crise
Le monde compte désormais 30,6 millions de chômeurs de plus qu'avant la crise financière de 2008.

3,3 millions en 2014
Pour 2014, l'OIT s'attend à une hausse de 3,3 millions du nombre des chômeurs dans le monde.

Maintien
"D'ici à 2019, le chômage atteindra 213 millions", prévoit l'organisation internationale, et "le nombre de sans-emplois devrait se maintenir globalement au niveau actuel de 6% jusqu'en 2017".

Hausse en Europe centrale
L'Afrique du Nord et le Moyen-Orient sont les régions qui auront le taux de chômage les plus élevés en 2014 avec des taux respectifs de 12,3% et 11,1%. La plus forte hausse en 2014 concernera l'Europe centrale et du Sud-Est et les pays de l'ancien bloc soviétique où le chômage atteindra 8,3% en 2014. 

Civiliser les organisations syndicales

Le blogue Terrains de lutte reprend un article publié à l'origine dans la revue Agone (n°50) ici en français, en intégralité.

Résumé de l'entretien et extraits.

Contexte de l'entretien avec un DRH
Comment se débarrasser de syndicalistes trop combatifs? C’est tout le travail des professionnels des ressources humaines. Petite leçon de stratégie de domestication syndicale par un DRH.
Cet entretien a été réalisé en avril 2006, avec l’ancien DRH d’une entreprise de papeterie du nord de la France, employant 900 salariés. Au moment de l’entretien, l’entreprise est en cours de restructuration, impliquant la suppression de 500 emplois. Ce DRH est parti à la retraite peu de temps avant, après avoir rempli cette fonction dans l’entreprise depuis 1990. Diplômé de Sciences-po Paris et titulaire d’un DESS en droit social, il avait occupé auparavant le même type de poste dans plusieurs autres grandes entreprises industrielles françaises, au gré d’une carrière professionnelle « dominée par les restructurations ».
Cette image illustre à merveille un article sur la concertation sociale du syndicat FGTB (ici)- et cet entretien

Un fond combatif

 (...)
c’est qu’il y a un vieux fond d’extrémisme quand même. Il paraît que là, dans les circonstances présentes, il y a toujours une centaine de personnes qui sont prêtes, je veux dire à mettre le feu, qui sont prêtes à… abîmer l’outil de travail, etc. Ça c’est un vieux fond de radicalisme qu’on est quand même arrivé à civiliser ou à enrayer, même s’il réapparaît un peu le jour où il y a une crise.
 Promouvoir les mous

 Et précisément, comment étiez-vous alors arrivé à civiliser un peu ces modes de relations entre euh… ?
Ben d’abord en les isolant, en les diminuant…
Vous parlez de syndicalistes ou de salariés ?
 Je parle des syndicalistes qui étaient de cet ordre-là. Maintenant, il n’y en a plus. Mais avant, il y en avait. […] La CGT était le syndicat dominant, de tradition. Mais c’est un syndicat qui n’a pas cessé de perdre, de la vitesse, de l’audience, pour l’excellente raison que ses syndicalistes étaient des gens, j’allais dire mûrs, des gens de confiance, des gens… donc au niveau de l’usine, promouvables… promotables, je sais plus comment… comment on dit, promouvables. Et que l’on a fait passer souvent dans le deuxième collège, en tant qu’agents de maîtrise, qu’on avait par ailleurs du mal à recruter à l’extérieur de l’entreprise de recrutement. Donc, on avait besoin de ces gens avec du savoir-faire. Et donc ce syndicat CGT, maintenant, il est tombé euh, en avant-dernière position en termes d’audience. Il doit représenter, je sais pas, euh… 15 %, quelque chose comme ça.
 Exclure les syndicalistes décidés
Mais on est arrivé à normaliser nos relations à partir du moment où un des syndicalistes est parti. C’était un syndicaliste qui était, j’allais dire un cas psychologique, et qu’on avait, à l’occasion de propos euh… anormaux, tenté de licencier là aussi. Mais ça n’a pas marché, l’inspecteur du travail ne nous a pas suivis, etc. c’est pour ça qu’on a enterré l’affaire. Mais on a réussi à négocier son départ beaucoup plus tard. Il a eu un projet personnel, il nous en a parlé et on a négocié son départ. Faut dire qu’il avait perdu, déjà, de l’audience auprès d’un certain nombre de ses collègues extrémistes parce qu’il avait négocié… il avait fini par signer un accord sur l’individualisation des rémunérations, et ça, ces collègues extrémistes ne le lui avaient jamais pardonné.
 "Normaliser" les relations avec les syndicats - ou la fin de la conflictualité sociale

C’est-à-dire ?
Ben, on arrive… on arrive à normaliser dans la mesure où… je vous indiquais qu’il y avait des grèves euh… à tort et à travers… auparavant, des menaces de grèves, je peux vous dire que… quand j’ai quitté C., il n’y avait plus eu de grève depuis l’année 2000… 2001, donc depuis cinq ans. Donc ça veut dire qu’on a dû arriver, quelque part, à normaliser. Et, ces syndicats n’étaient peut-être pas nécessairement d’accord avec cette évolution, mais on peut ­supposer que le rapport des forces n’était pas suffisant pour qu’ils aillent trop loin. Eh ouais, bon, honnêtement, je pense aussi que la professionnalisation du management, je crois que ça a aussi profondément fait évoluer les gens.

Les cadres techniques deviennent des managers

(...)
[O]n a demandé aux ingénieurs et à l’encadrement opérationnel d’être aussi des managers de leurs salariés. Et on les a accompagnés pour cela, pour changer les modes de relations. On les a incités par exemple à faire des réunions, à avoir des rencontres régulières avec les salariés. […] Ça permet, quand on a des problèmes, de les avoir maintenant en amont, donc d’avoir quand même un dialogue avec la personne, avant qu’éventuellement ce dialogue soit avec les représentants syndicaux. L’important pour nous c’est que l’encadrement discute avec les opérateurs pour désamorcer les problèmes qui peuvent l’être. Sinon, on se retrouve avec la guéguerre habituelle : quand le salarié a un problème, il vient en parler à son chef ou à nous, mais aussi à l’organisation syndicale. Et effectivement, l’organisation souhaite se valoriser en portant tout de suite le problème auprès de nous, dans les instances. C’est normal, c’est son jeu. Et tout de suite, ça risque d’envenimer la situation, etc. C’est pour ça que notre objectif, c’était que le salarié puisse discuter de ses problèmes mais avec la hiérarchie directe.

L'assurance


Perle glanée sur Fb que je soumets à votre réflexion:

On touche aux fondements de la sécurité sociale quand on la décrit comme une "assurance" alors qu'elle est FONDAMENTALEMENT une mutuellisation, une mise en commun, un partage de la masse salariale permettant d'investir (sans recours aux marchés financiers et à la dette) dans la protection sociale. Le consensus de Philadelphie permettait de considérer la protection sociale comme un investissement. Le consensus de Washington ne le permet plus. Et c'est ce dernier qui inspire les politiques européennes et incite l'OCDE à requalfiier nos "prestations sociales" (investissements en salaires octroyés à des producteurs hors emploi) de "charges fiscales globales sur le travail".

Si on veut défendre la sécurité sociale pour ce qu'elle est, on devra tôt ou tard redire ces vérités, sortir d'un thatchérisme à la De Wever ET des formules molles qui ont été utilisées en Allemagne (Schmidt, Schröder), en France (Delors, Rocard, DSK) ou en Angleterre (Blair) pour y réagir.

Vivement un socialisme émancipé qui parvient à remettre à leur place respective: les marchés, la fonction publique et les prestations sociales.

http://abecedairedelemploi.blogspot.be/2014/04/la-declaration-de-philadelphie.html

Fontion publique et service public

Enfin, presque. En fait, ils défilent pour défendre le service publique, ce qui n'a rien à voir et est - de notre humble point de vue anti-employiste - tout à fait contre-productif. La notion de service public se positionne du point de vue du client, de la prestation et, implicitement, de la force de travail, de la rémunération du travail à la pièce alors que la fonction publique se place du point de vue du producteur, de son statut et de sa qualification - une pratique du travail infiniment moins nuisible. C'est cette pratique qui doit être universalisée à l'ensemble des travailleurs et non la qualité d'une quelconque prestation professionnelle.

Extrait de l'article de l'Humanité (ici, en français)

De Bastille à Montparnasse, 22 000 cheminots ont envahi les rues de Paris, cet après-midi, pour garantir l’avenir du service public de la SNCF et dénoncer fermement la réforme ferroviaire, actuellement en préparation par le gouvernement. Un énième « avertissement » a été lancé au gouvernement par les fédérations syndicales CGT, UNSA et SUD-Rail.

(...) Une foule à hauteur de 22 000 cheminots, venus de toute la France, peut-on voir du haut d’un immeuble parisien. Contre le projet de loi préparé actuellement par le gouvernement pour la plus grande entreprise nationale publique, la SNCF, après avoir échoué à corriger la dette colossale du rail en séparant cette dernière du Réseau ferré de France, les cheminots « ne laisseront pas faire », a assuré Gilbert Garrel, secrétaire général de la fédération CGT Cheminots. Présentant cette manifestation comme un « avertissement qui doit conduire le gouvernement à revoir sa copie », les organisations syndicales dénoncent la volonté du gouvernement de vouloir diviser la SNCF en trois établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) : la « maison mère » ; l’infrapôle et le RFF (Réseau ferré de France) actuel. Une scission « directement liée au quatrième paquet ferroviaire européen et à la libéralisation complète du transport de voyageurs prévue pour 2019»

Le rapport de la Confédération Internationale des Syndicats

L'Ituc (Confédération des syndicats, en français) a publié son atlas des pays selon le respect du droit de l'emploi (ici, en anglais). Cette organisation a un point de vue employiste (ce qui n'est pas très grave quand il s'agit d'information) et son classement repose sur des critères exclusivement législatifs, notamment des critères relatifs à la liberté syndicale (sauf la catégorie 5+, voir ci-dessous).

Ce biais n'est pas nécessairement inintéressant, il s'appuie sur un remarquable travail de fourmi mais il fait l'impasse sur les salaires (les salaires minimums, les salaires sociaux ou les salaires effectifs), sur la quantité horaire de travail, sur les congés payés, sur les limites à la propriété lucrative, sur les considérations écologiques, sur le harcèlement qui sont au cœur de l'entreprise actuelle.

  • Le classement

La catégorie 5+ reprend les pays en guerre où l'État ne peut faire appliquer la loi - la législation sociale n'a plus lieu d'être dans ces pays.

Centrafrique, Libye, Palestine, Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Syrie, Ukraine

On comprend l'intérêt des employeurs à faire entrer l'Ukraine dans un espace de concurrence libre et non faussée!

La catégorie 5 reprend les pays où l'emploi est un enfer. Le droit social existe éventuellement mais il n'est pas appliqué et les travailleurs sont confrontés à l'arbitraire, à l'autocratie patronale la plus débridée.

Algérie, Bangladesh, Biélorussie, Cambodge, Chine, Colombie, Côte d'Ivoire, Égypte, Fidji, Grèce, Guatemala, Inde, Laos, Malaisie, Nigeria, Philippine, Qatar, Corée, Arabie Saoudite, Swaziland, Turquie, Émirats Arabes Unis, Zimbabwe, Zambie 
Exploit remarquable pour l'Europe de la paix, pour l'Europe sociale puisque l'un de ses membres se retrouve dans la catégorie des pays de l'emploi les plus pourris.

La catégorie 4 reprend les pays dans lesquels il y a des violations de droits systématiques, dans lesquels les droits sociaux sont menacés par les gouvernements ou les entreprises.

Argentine, Bahreïn, Botswana, RD Congo, Salvador, Haïti, Honduras, Hong-Kong, Indonésie, Iran, Irak, Jordanie, Kenya, Koweït, Liban, Mali, Mauritanie, Maurice, Mexique, Maroc, Myanmar, Népal, Oman, Pakistan, Panama, Pérou, Sierra Léone, Thaïlande, États-Unis d'Amérique, Yémen

On remarquera que les frères ennemis: Iran-Irak ou États-Unis-Pakistan se réconcilient quand il s'agit de bafouer les droits syndicaux.

La catégorie 3 reprend les pays dans lesquels les gouvernements ou les compagnies interviennent contre les droits des travailleurs, droits souvent lacunaires.

Australie, Bahamas, Bénin, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Burundi, Canada, Tchad, Chili, Costa-Rica, Djibouti, Équateur, Éthiopie, Géorgie, Ghana, Israël, Lesotho, Madagascar, Mozambique, Namibie, Paraguay, Pologne, Portugal, Congo, Roumanie, Singapour, Sri Lanka, Taïwan, Tanzanie, Ouganda, Grande-Bretagne, Venezuela

La catégorie 2 reprend les pays dans lesquels les droits existent mais sont compromis dans leur exercice par les attaques répétées du gouvernement ou des compagnies.

Albanie, Angola, Belize, Bosnie-Herzégovine, Burkina-Faso, Cameroun, Croatie, République Tchèque, Dominique, Hongrie, Irlande, Jamaïque, Japon, Lettonie, Macédoine, Malawi, Moldavie, Nouvelle-Zélande, Russie, Rwanda, Sénégal, Serbie, Espagne, Suisse

La présence de la Suisse dans cette catégorie prouve qu'il ne suffit pas d'être un pays riche pour que les droits syndicaux soient respectés. Ce pays fait d'ailleurs son entrée dans cette catégorie du fait de la dégradation des droits syndicaux là-bas.

La catégorie 1 reprend les pays où les travailleurs jouissent de la liberté d'association et, généralement, ont des droits respectés.

Barbade, Belgique, Danemark, Estonie, Finlande, France, Allemagne, Islande, Italie, Lituanie, Monténégro, Pays-Bas, Norvège, Slovaquie, Afrique du Sud, Suède, Togo, Uruguay.

La présence de la Belgique dans cette catégorie interroge la finesse d'une étude basée sur les témoignages syndicaux: la liberté syndicale y est fortement entravée puisque, pour créer un nouveau syndicat qui soit un interlocuteur social, il faut un nombre minimum de membres (60.000). Cette règle limite la représentation syndicale aux trois grands syndicats, des syndicats d'État inscrits dans une logique de concertation, très peu combatifs. La FGTB, par exemple, a, à plusieurs reprises, exclu des membres trop intègres dans leur lutte pour les travailleurs. Ces syndicats ne vont évidemment pas faire rapport de leurs propres pratiques anti-démocratiques.

D'autre part, en Belgique toujours, ce sont les syndicats qui détiennent les mandats de la délégation et non les délégués de sorte que la hiérarchie syndicale prend l'habitude de se débarrasser des délégués trop remuants, ce sont les permanents qui décident pour les délégués et, au sein des permanents, ce sont les responsables qui décident. Cette façon de faire obère la démocratie sociale de manière particulièrement voyante quand les secrétaires généraux des syndicats passent dans des partis politiques ou quand leur conjoint occupe une place de choix dans les structures partisanes.

  • Cinq pays
Le rapport fait ensuite le tour de cinq pays exemplaires de leur niveau de liberté syndicale.

Le Cambodge (5) utilise la violence armée contre les revendications légitimes des travailleurs. Ils travaillent dans des conditions dangereuses, sont menacés, etc.

 Le Koweït (4) dont les immigrés connaissent des conditions de travail particulièrement pénibles intimide et menace les représentants syndicaux et les organisateurs de grèves légales.

Le Ghana (3) en dépit d'un cadre légal favorable ne combat pas les discriminations et restreint le droit de grève.

En Suisse (2), les droits des représentations des travailleurs sont souvent sapés par sous-informations des intéressés. Les délégations syndicales demeurent marginales.

Le droit d'association et de grève est pleinement reconnu en Uruguay (1). Les syndicats n'en rapportent aucune plainte et, logiquement, ce pays accède à la première catégorie. Ce pays connaît pour le moment une forte mobilisation pour le salaire chez les enseignants - mobilisation qui n'est pas entravée.

La charte sociale européenne

Cet article est disponible en PDF ici
  • La charte

Nous informons nos aimables lecteurs que 47 pays ont signé la charte sociale européenne en 1961. Cette charte a force de loi dans les pays signataires et stipule, notamment:

  • structure de soins accessible et efficace pour l’ensemble de la population ;
Ceci interdit spécifiquement tout recours à des mutuelles (complémentaires, obligatoires) payantes et imposent un financement de la santé par la seule cotisation (ou par l'impôt).
  • politique de prévention des maladies, y compris garantie d’un environnement sain ;
Ceci interdit spécifiquement toute activité économique, industrielle susceptible de dégrader ledit environnement.
  • élimination des risques en milieu professionnel pour assurer en droit et en pratique la santé et la sécurité au travail ;
  • protection de la maternité.
  • interdiction du travail forcé ;
Ceci exclut toute forme d'esclavage, notamment l'emploi sous la menace du chômage.
  • interdiction du travail des enfants ;
  • conditions de travail spécifiques entre 15 et 18 ans ;
  • droit de gagner sa vie par un travail librement entrepris ;
  • politique économique et sociale pour assurer le plein emploi ;
Tous les pays où le taux de chômage excède les 5% contreviennent à cet article.
  • conditions de travail équitables en matière de rémunération et de durée du travail ;
Ceci implique l'abolition de la rémunération à la tâche, à la force de travail et impose la qualification du travailleur comme source de salaire.
  • protection contre le harcèlement sexuel et moral ;
Ceci impose la fin de la fonction social d'employeur, de son pouvoir sur ses employés: on peut organiser l'activité de production de manière hiérarchique mais personne ne peut s'arroger le droit disposer de la carrière d'autrui puisque ce type de pouvoir permet le harcèlement sexuel et moral.
  • liberté de constituer des syndicats et des organisations d’employeurs pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux ; liberté individuelle d’y adhérer ou non ;
Cette liberté est fortement limitée dans certains pays. En Belgique, par exemple, le seuil du nombre d'adhérents pour pouvoir prétendre s'organiser en syndicat rend la création de nouveaux syndicats techniquement impossible.
  • promotion de la consultation paritaire, de la négociation collective, de la conciliation et de l’arbitrage volontaire ;
La consultation paritaire impose la représentation de toute les parties au pro rata de leur importance. Les chômeurs, les retraités ou les invalides doivent, par exemple, être représentés dans toutes les décisions qui les concernent, qu'elle soient relatives aux prestations de la sécurité sociale ou aux cotisations sociales.
  • protection en cas de licenciement ;
Ceci impose d'attacher le salaire à la personne et non au poste de travail.
  • droit de grève ;
  • accès à l’emploi pour les personnes handicapées.
Par ailleurs, la charte détaille les droits humains que les signataires doivent respecter. Ces droits sont eux aussi rarement compatible avec la vente forcée de la force de travail dans l'emploi:
  • protection contre la violence et la maltraitance ;
 La violence du vol du temps des travailleurs par les propriétaires lucratifs est interdites. La maltraitance de la mise en minorité de l'emploi est interdite.
  • interdiction de toute forme d’exploitation (sexuelle ou autre) ;
 Tout surtravail est un vol, toute plus-value liée au travail d'autrui est un vol et sont des formes d'exploitation interdites.
  • protection juridique de la famille (égalité des époux entre eux et vers les enfants, protection des enfants en cas de rupture) ;
Ceci impose un droit à un salaire personnel inconditionnel.
  • droit à la sécurité sociale, à l’assistance sociale et à des services sociaux ;
Cet article est directement violé par le harcèlement institutionnel des chômeurs, en France, en Belgique ou en Allemagne (entre autres).
  • droit à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale ;

  • Les recours
Nous citons le site de l'organisation (ici, en français)
Organisations habilitées à saisir le Comité :
– Pour tous les Etats qui ont accepté la procédure :
  1. Confédération européenne des syndicats (CES), BUSINESSEUROPE (ex-UNICE) et Organisation internationale des employeurs (OIE).
  2. Les organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut participatif auprès du Conseil de l’Europe et inscrites sur une liste établie à cette fin par le Comité gouvernemental ;
  3. Les organisations d’employeurs et les syndicats de l’Etat concerné ;
  4. – Pour les Etats qui, en plus, acceptent cette possibilité :
  5. Les ONG nationales.
Le dossier de la réclamation doit contenir les éléments d’information suivants :
  1. les nom et coordonnées de l’organisation réclamante ;
  2. la preuve que la personne qui introduit et signe la réclamation est habilitée à engager l’organisation réclamante ;
  3. l’Etat mis en cause ;
  4. les dispositions de la Charte dont la violation est alléguée ;
  5. l’objet de la réclamation, c’est-à-dire le ou les points sur lesquels l’Etat mis en cause n’aurait pas respecté la Charte, ainsi que les arguments pertinents ; avec documents à l’appui.
À bon entendeur ...

  •  Les États signataires
 Albanie, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Chypre, République tchèque, Danemark,
Estonie, Finlande, France, Géorgie, Allemagne, Grèce, Hongrie, Islande, Irlande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte, Moldavie, Monaco, Monténégro, Pays-Bas, Norvège, Pologne, Portugal, Roumanie, Russie, Saint-Marin, Serbie, Slovénie, Espagne, République slovaque, Suède, Suisse, Macédoine, Turquie, Ukraine, Grande-Bretagne,

L'économie en tableaux

Mother Jones partage 11 graphiques qui montrent l'économie de l'emploi pour ce qu'elle est: une gigantesque machine à misère (ici, en anglais). Nous traduisons leurs commentaires.

La productivité a explosé mais les revenus et les salaires ont stagné pour la plupart des Américains. Si le revenu médian (celui de la personne qui compte autant de gens plus riches qu'elle que de gens plus pauvres) avait augmenté au même rythme que l'économie depuis les années 1970, il s'élèverait à 92 mille $ au lieu des 50 mille $ actuels.

Évolution depuis 1979 - Productivité - Revenu moyen des 1% les plus riches - Revenus moyens





La croissance revient ...
Évolution du PIB et pic avant la récession




Gel des salaires


Croissance du salaire minimum en valeur réelle depuis 1990: 21%
Croissance du coût de la vie depuis 1990: 67%
Salaire minimum annuel: 15.080$
Revenu nécessaire à la sécurité matérielle pour un travailleur isolé: 30.000$


... mais pas les emplois
Évolution du chômage et pic avant la récession


Part des employés qui travaillent plus de 50 h par semaine (qualifiés - revenus intermédiaires - bas revenus)
Salaire annuel moyen des syndiqués: 47.684$
salaire annuel moyen des non syndiqués: 37.284$
Proportion des travailleurs syndiqués aux USA
 Où est mon boulot?

De plus en plus de multinationales US virent leurs employés aux USA et embauchent à l'étranger.
Emplois gagnés (en bleu, à l'étranger) et emplois perdus (en rouge, aux USA)
 


 Pour les Américains dans leur ensemble, la durée moyenne de la semaine de travail n'a pas beaucoup changé depuis des années. Mais, pour beaucoup de travailleurs de la classe moyenne, les obligations professionnelles envahissent le temps libre, le temps en famille. Les bas salaires ont vu leur semaine de travail diminuer faute d'emploi disponible.


Week-end chômé légal par pays; congés payés en semaines par pays; congés de maternité en semaines par pays

Workfare

Cet article est disponible en PDF ici

Un blogueur anglais écrit une lettre aux amateurs de workfare. Le workfare, c'est l'État qui prend soin par le travail. Ce mot a été composé comme celui de welfare (l'État qui prend soin par le bien-être voir notre article sur la sécurité sociale anglaise ici) ou le warfare (l'État qui prend soin par la guerre).

Le workfare est inspiré du producérisme, l'idéologie qui conditionne le droit de vivre à la vente de la force de travail à un employeur: l'État donne de l'argent aux chômeurs à condition qu'ils travaillent pour un employeur, gratis. Des expériences de travail gratuit ont déjà été menée pour les sans abris en Allemagne ou aux Pays-Bas (ici et ici), pour les minorités ethnique, en Hongrie (ici) et, pour les prisonniers, aux États-Unis (ici).

Voici la lettre traduite et résumée de Another Angry Voice (ici, en anglais) aux supporters du workfare. Il ne s'agit pas d'une lettre anti-employiste (nous en respectons le ton) mais elle a l'intérêt de décrire les effets catastrophiques du producérisme outre-Manche ... et ici.

- La stigmatisation des chômeurs est une manière de détourner l'attention sur le symptôme et non sur le mal. Les chômeurs subissent le chômage et, avec un chômage de masse, il est difficile de leur attribuer des caractéristiques intrinsèques sans tomber dans la mauvaise foi. Par contre, l'armée de réserve de chômeur permet d'atteindre le point d'équilibre du chômage (voir le NAIRU) qui évite toute inflation et maintient la pression sur les salaires. Cette armée de réserve permet de maintenir les taux de profit mais ces profits sont engloutis à l'échelle nationale par le fait qu'il n'y ait pas d'emploi pour des millions de personnes qui n'ont pas de salaire pour soutenir la demande.

La plupart des chômeurs sont des travailleurs ordinaires qui n'ont pas d'emploi parce que l'économie est mal gérée. Dans leur immense majorité, ils préféreraient vivre avec un vrai salaire plutôt qu'avec les indemnités misérables que leur octroie l'État [en Angleterre, la sécurité sociale est organisée par l'État, par l'impôt].

Si vous êtes fâché, il faudrait peut-être l'être contre les gens qui ont mal géré l'économie, qui ont organisé le chômage pour comprimer les salaires.
Incriminer les victimes
Pour chaque offre d'emploi, il y a des centaines de candidatures, il y a des millions de sans emploi qui recherchent des centaines de milliers d'emplois. Il y a plus de chômeurs que d'offres d'emploi. C'est le système qui est dysfonctionnel, pas les chômeurs.

Ce ne sera que quand le public mettra la pression sur l'État pour abandonner les pseudo théories économiques néolibérales qui exigent une masse de chômeurs que le plein emploi reviendra.

Si le plein emploi revient jamais et qu'il y a plein d'offres d'emploi pour tous ceux qui veulent travailler (comme c'était le cas au début des années 50 et à la fin des années 70), alors vous pourrez vous sentir libres d'en vouloir à la minorité de gens qui choisit de rester sans emploi alors qu'il y a plein d'emplois disponibles - en attendant, réservez votre rancœur aux vrais coupables.

Une aide orwellienne

- L'"aide" aux chômeurs ressemble souvent à un cadeau empoisonné qui les entraîne dans la misère: ils sont tenus d'interrompre leur formation, leur apprentissage ou leur travail bénévole pour faire des tâches ineptes payées au lance-pierre. Ils doivent prester ces travaux forcés pour des compagnies qui réduisent du coup leur masse salariale. Les chômeurs au travail forcé remplacent alors des gens qui auraient été payés pour le faire sans que cet emploi ne leur fasse acquérir la moindre expérience professionnelle autre que le nettoyage du sol ou l'ouverture de caisses.

- Six mois à nettoyer les sols ou à déballer des caisses qualifieront en tous cas infiniment moins que six mois de travail bénévole, d'apprentissage. Les employeurs qui embauchent des travailleurs forcés plutôt que des travailleurs motivés, à la recherche d'un emploi, d'une qualification ou d'une expérience ne sont pas n'importe qui: il est très improbable qu'ils embauchent les chômeurs au terme de leur "expérience" de six mois à déballer les caisses.
 Le "workfare" ne marche pas
Les chômeurs qui subissent le workfare ont le même taux de retour à l'emploi qu'un groupe test de chômeurs qui ne le subissent pas (soit, 18%). Le travail gratuit obligatoire est aussi efficace que rien du tout mais coûte 300 millions de livres (360 millions €) aux contribuables. Donc, il vaut mieux ne rien faire du tout.

 Des subventions aux compagnies

À y regarder de plus près, le workfare n'est pas un plan contre les chômeurs "paresseux" mais c'est un plan pour subventionner les compagnies sous la forme de main d'oeuvre gratuite. Tous ceux qui ont un emploi moyennement ou faiblement qualifié devraient s'inquiéter de l'extension voulue du workfare. Ce serait contraire aux intérêts de l'employeur de conserver des travailleurs payés avec les droits du travail alors qu'il suffit de les licencier et de les remplacer par des esclaves du worfare qui ne doivent pas être payés, qui ne jouissent pas de droit et peuvent être licenciés à l'envi.

Les seuls bénéficiaires du workfare, ce sont les compagnies qui veulent diminuer leurs coûts en remplaçant le travail payé par du travail gratuit et les compagnies parasites qui veulent administrer ce plan gouvernemental de confiscation.

Totalitarisme

Les gens qui pensent que le gouvernement a le droit de confisquer le travail des individus sont des supporters de l'État totalitaire. Ce type de personne croit que le peuple existe pour servir les intérêts du gouvernement et non que le gouvernement existe pour servir les intérêts du peuple.

Approuver le vol du travail des individus par le gouvernement est une pente très dangereuse car on voit mal alors un gouvernement applaudi parce qu'il vole le travail des gens ne pas être tenté de voler la propriété aussi. [Nous sommes tellement d'accord qu'on ne voit pas non plus pourquoi le vol de travail par des compagnies qu'est l'emploi n'est pas non plus la voie vers le totalitarisme]

À quoi sert l'Assurance Nationale?

 L'assurance nationale n'est pas un revenu mais une assurance que les travailleurs sont obligés de payer [il s'agit de la version anglaise de la sécu]. Obliger quelqu'un à payer une assurance quand il travaille puis conditionner les versements des indemnités de cette assurance à des prestations forcées et gratuite est contraire au droit, c'est une fraude.
Commentaires: dans les pays bismarkiens (la Belgique, la France ou l'Allemagne), les salaires sont socialisés, le chômage est un salaire de plein droit. Il est attaché au salaire, aux droits ouverts comme salariés. Il n'est pas lié au "j'ai cotisé, j'ai droit" du modèle assurantiel anglais mais est attaché au statut d'une personne (à qui effectivement, on n'a pas fait de cadeau quand il s'agissait de payer les cotisations sociales). Déchoir un citoyen de son statut, de ses droits pose également des problèmes juridiques bien qu'ils soient d'une autre nature que dans le modèle assurantiel. Il faudrait que les autorités puissent expliquer au nom de quelle loi le chômeur peut-être déchu de son statut de salarié (qu'il cherche de l'emploi ou non, d'ailleurs).

Est-ce que vous travailleriez pour trois euros de l'heure?

Même si vous considérez les allocations de chômage misérables de 88€ par semaine comme un salaire, faire travailler un adulte plus que 11h par semaine pour les recevoir casse le salaire minimum et les droits des pauvres victimes.

Est-ce que vous travailleriez 30 h par semaine pendant six mois pour trois euros de l'heure outre l'assurance chômage que vous avez déjà payée quand vous travailliez?

Si oui, vous êtes cinglé. Si non, pourquoi voulez-vous que d'autres le fassent?


Si le travail mérite d'être fait, il mérite qu'on paie quelqu'un pour le faire

Pour chaque chômeur forcé à travailler dans un de ces plans de confiscation financés par le contribuable, il y un emploi mal payé, peu qualifié en moins dans l'économie et donc un chômeur en plus ailleurs. Les seuls bénéficiaires, ce sont les intérêts des compagnies qui sont subventionnées par l'argent des contribuables pour avoir du travail gratuit.

Si nous permettons au gouvernement de saper le droit du travail et le salaire minimum comme ceux qui subventionnent le secteur des compagnies, il y a aura finalement des millions de personnes qui seront chassées de leur emploi et qui seront remplacées par des victimes du workfare.

Les gens qui n'ont pas réfléchi aux conséquences du workfare ont un gros problème parce qu'ils soutiennent les plans de confiscation de travail, ils soutiennent la paupérisation et le chômage qui sont justement les prétextes à ces plans.

Ce ne sont pas les "profiteurs oisifs" qui sont responsables de la pauvreté et du chômage mais ce sont les penseurs paresseux et réactionnaires qui suivent la propagande qui incrimine le symptôme et non la cause, des soutiens de cette sorte sont anti-progressistes de manière caricaturale et hérétiques en termes économiques.
     

Impasses de l'agriculture industrielle

La catastrophe que subit la communauté indigène est une conséquence directe du démembrement rapide et violent des institutions fondamentales […] disloquées par le fait même qu’une économie de marché est imposée à une communauté organisée de manière complètement différente. Le travail et la terre deviennent des marchandises […] Dans la seconde moitié du 19e, les masses indiennes ne sont pas mortes de faim parce qu’elles étaient exploitées par le Lancashire (Angleterre), elles ont péri en grand nombre parce que les communautés villageoises avaient été détruites.

K. Polanyi, La Grande transformation

Nicolas Sersiron fait le bilan de l'agriculture industrielle dans un excellent article du CADTM publié (et à lire) ici.

Voici en résumé quelques points abordés:

- Cette agriculture cherche le profit des propriétaires terriens lucratifs.

- Elle accapare les terres et les ressources naturelles (eau, pétrole) au détriment des besoins vivriers.

- Les intrants sont des perturbateurs endocriniens qui menacent la santé.

- Les pratiques agricoles industrielles stérilisent les sols.

- Les rendements industriels sont à peine supérieurs aux rendements de l'agriculture biologique, eux-mêmes six fois supérieurs aux rendements agricoles du début du XXe siècle.

- Dans les Pays en Développement, la libéralisation de l'agriculture a été une catastrophe pour les paysans locaux soumis à une concurrence déloyale (dans le Nord, les rendements sont supérieurs du fait du climat, de la taille des exploitations et l'agriculture est abondamment subsidiée par la PAC, par exemple, ce qui permet d'exporter les produits agricoles en dessous de leur prix de reviens).

- Les dettes honteuses empêchent une politique de redistribution des terres volontariste.

 - Des techniques agricoles écologiques, sans mécanisation existent, telles le SRI (système de riziculture intensive) créé à Madagascar mais sont rarement appliquées faute d'investissement des autorités et de formation.

- Près de trois milliards d'humains sont insuffisamment nourris pour avoir une vie active alors qu'on évalue les capacités nourricières agricoles mondiales à douze milliards d'individus.

- L'agriculture familiale nourrit encore environ 80% des humains.

- L'agriculture chinoise qui assimilait le carbone depuis 5000 ans est devenue une source de pollution.

- L'agro-industrie crée les OGM, elle pollue avec les nitrates et les pesticides.

- Avec l'accroissement de la taille des exploitations, les agriculteurs indépendants deviennent des employés (et, pour une minorité, des employeurs). Au total, la main d’œuvre utilisée diminue, ce qui précipite des millions de personnes dans le chômage.

- La spéculation, la fragilité des techniques industrielles aux aléas climatiques et les sirènes des agrocarburants rendent les prix alimentaires extrêmement volatiles, ce qui menace la sécurité alimentaire des plus pauvres.

- L'agriculture industrielle est extrêmement polluante et participe de manière décisive à la production de gaz à effet de serre. Le réchauffement climatique auquel elle contribue affecte tout le monde.

Le sous-commandant Marcos appelle à s'approprier les moyens de production

Nous traduisons et résumons un article de La Jornada du 30 avril 2006 (ici, en espagnol) qui partage une déclaration du porte-parole de l'EZLN à l'occasion d'une rencontre entre les travailleurs et le sous-commandant. Il y est question du premier mai et, par là même, de quelques sujets qui nous intéressent: les conditions de travail, la propriété des outils de production, etc.

Le sous-commandant Marcos a appelé les travailleurs à ne pas se contenter de lutter pour la démocratie syndicale ou de meilleurs salaires mais à "lutter pour détruire les capitalistes et leur enlever la propriété des moyens de production". [voir nos articles sur la démocratie, le syndicat et les salaires]

Selon Marcos, ce sera la détermination des travailleurs sur ce sujet qui permettra de célébrer un "autre premier mai" avec "un autre mouvement ouvrier, un mouvement qui sorte de la honte". Il a également souligné que cette détermination déterminera le "caractère de classe, d'exploité contre exploiteurs" et il a appelé à cette détermination, parce que "nous avons vu beaucoup de souffrance et de douleurs partout et nous avons touché beaucoup de cœurs rebelles disposés à se lever contre l'oppression, contre le système capitaliste".

En participant à la première rencontre ouvrière nationale de l'Autre Campagne, dans les locaux du Syndicat national des travailleurs de Uniroyal, le délégué Zéro, après avoir exprimé sa sympathie pour les mineurs "massacrés" de Sicartsa (Michoacan), a exposé que la cause de tous les maux de la classe ouvrière, c'est justement le capitalisme. D'où l'importance pour les travailleurs de combattre ce modèle économique. 

"Nous Zapatistes, nous pensons que capitalisme naît, prospère et se reproduit dans et par l'injustice. Les riches et les puissants le sont parce qu'ils enlèvent la richesse à ceux qu'ils exploitent, à ceux qui travaillent dans les villes, dans les champs, dans les montagnes, dans les rivières, sous la terre, sur la mer. Nous disons également que le capitalisme transforme tout en marchandise et qu'il organise toute la société pour produire des marchandises, pour qu'elles s'achètent et se vendent. De ce fait, nous, zapatistes, nous voyons que le responsable de nos peines et de nos malheurs, c'est le système, le système capitaliste. Nous comprenons que le capitalisme est l'ennemi et que nous ne pourrons vivre dans la dignité et dans la paix tant que ce système et tout ce qui le soutient ne sera pas détruit ". La rencontre a montré l'ampleur récente des mouvements de travailleurs au pays du néolibéralisme de Fox [le Mexique]. On a pu mesurer le lien transcendant avec les révoltes de migrants sans-papier aux États-Unis comme reflet indirect du démantèlement social et économique dont souffrent les ouvriers, les paysans et les Indiens au Mexique. Les participants ont mentionné une autre référence internationale: les révoltes de la jeunesse et des travailleurs en France font partie d'une nouveau cycle de protestation, de regroupement de travailleurs et de syndicats dans le monde capitaliste actuel.

Marcos a expliqué un aspect de l'impact capitaliste: la chute du pouvoir d'achat des salariés et il a illustré la misère dans le District Fédéral [à la capitale]: pour payer le loyer, les aliments de base, l'énergie, les vêtements, l'éducation et la culture, une ouvrier mexicain devrait travailler 47 heures et 47 minutes par jour en janvier 2006.

Le délégué Zéro a montré que les effets du capitalisme sur les prestations salariales ont été énormes à Mexico: "Les travailleurs sans salaire, c'est-à-dire sans argent de poche, sans retraite, sans assistance médicale sont passés de 5,5 millions en 1988 à plus de 26 millions en 2004. Simultanément, l'exploitation s'est intensifiée dans le pays. Le temps de travail qui retournait en salaire à l'ouvrier était de trois heures par jour en 1976, il est de 13 minutes aujourd'hui. Le reste de la journée de travail part pour le patron et l'État." [c'est ce que nous appelons le surtravail]

Il a également souligné que la relation marché-salaire masque l'exploitation des travailleurs. Il a remarqué que la base fondamentale du système capitaliste, c'est la propriété [lucrative] des moyens de production, et il a assuré que "[l]e propriétaire était capitaliste s'il ne remettait pas en cause cette relation de propriété."
Il a affirmé que les zapatistes pensent que les travailleurs du champ et de la ville non seulement devaient lutter pour de "meilleurs salaires, de meilleures conditions de travail, de sécurité dans l'emploi, pour des prestations, de l'argent de poche, pour la liberté et la démocratie syndicales" mais que l'autre mouvement ouvrier "devait lutter pour nous arracher les capitalistes à la propriété privée des moyens de production. "Si nous sommes les dépossédés et eux les possédants, nous devons utiliser cette force pour en finir avec eux, pour que la possession change de camp, qu'elle soit celle des travailleurs et des travailleuses".

 Marcos s'est étonné du fait que le premier mai prochain défilent des organisations aux idéaux politiques opposés. Lors de ces rencontres qui ont rassemblé plus de 100.000 personnes, des participants ont notamment dénoncé les leaders syndicaux jaunes et ont raconté leurs tentatives de nécessaires dissidences - on a aussi évoqué les syndicats qui se rangeaient du côté patronal, contre le droit du travail et les travailleurs ou une grève de 50 jours non indemnisée par le syndicat jaune CTM [que l'on songe au fameux Roberto Dorazzio en Belgique dont le mouvement de grève avait été saboté par le syndicat dont il faisait partie]. Les travailleurs de maquiladoras ont annoncé qu'ils commençaient à se structurer en syndicats.

Le premier mai

De notre point de vue, le premier mai est la fête des travailleurs, non la fête du travail, même si nous promouvons le travail débarrassé de l'emploi.

Cette fête concerne indifféremment les travailleurs sous le joug de l'emploi que ceux qui ont pu s'en défaire. C'est le salaire qui est le fondement de la création de valeur ajoutée, de valeur économique - que ce salaire soit celui d'un fonctionnaire, d'un employé ou d'un retraité n'a pas d'importance.

Les revendications historiques du premier mai ont toujours tourné autour de

- la réduction du temps d'emploi
- le maintien ou l'augmentation des salaires.

Nous adhérons pleinement à ces revendications (et même à la suppression de l'emploi). Nous rappelons qu'elles sont totalement étrangères au ralliement à des partis employistes plus ou moins bourgeois, que l'appel à voter PS de la FGTB en la circonstance est non seulement incongru mais obscène.

Historiquement, le premier mai commémore une manifestation nationale qui eut lieu à travers les États-Unis en 1886. Il s'agissait de lutter contre l'emploi en réduisant la journée d'emploi à huit heures (durée qui ferait rêver pas mal de cadre, d'ouvriers de la construction ou de caissières, de nettoyeuse à horaire coupé). À l'appel des anarchistes, la mobilisation eut un succès impressionnant, elle rassembla plus de 300.000 participants.
À Chicago, la grève se prolonge et sa répression se solde par des morts. Une bombe explose ensuite qui tue quelques policiers et, par représailles, les autorités vont condamner à mort cinq syndicalistes anarchistes sans la moindre preuve.

Daniel Mermet a emmené ses auditeurs à Chicago pour la circonstance (voir l'émission de radio Là-bas si j'y suis ici).

À l'occasion du centenaire de la Révolution française, depuis 1889, cet événement est commémoré dans le monde entier sous le nom de fête des travailleurs (et non, comme veulent le faire croire les employistes, de fête du travail).

À Fourmies, dans le Nord de la France, le premier mai 1891, les policiers tirent sur les manifestants et font neuf morts.

Le courage de nos glorieux ancêtres, l'intégrité de leur lutte et de leur décision sont des sources d'inspiration pour nous.