Un déficit démocratique

En France, le "déficit" de la sécu, c'est 10 milliards.

En France, les exemptions de cotisations patronales, c'est 30 milliards.

En France, donc, le bénéfice primaire de la sécu s'élève à 20 milliards mais les cadeaux donnés aux employeurs, aux propriétaires lucratifs, au cac40, aux actionnaires induisent un déficit artificiel.

Et si on arrêtait de pomper une idée qui marche - la sécu par prestations-cotisations - avec une idée qui ne marche pas - l'emploi par les propriétaires lucratifs?

La propriété lucrative

Un justiciable qui enlève un enfant et le fait travailler de force se rend coupable de détournement de mineur et de travail forcé. Il encourt une peine de prison.

Un actionnaire d'une compagnie qui a recourt directement ou indirectement, via un sous-traitant, au travail forcé d'enfants captif ne se rend coupable de rien. Il est considéré comme un homme respectable. Sa richesse est légitime.

Pourtant, ils font exactement la même chose et s'enrichissent exactement de la même façon.

Un justiciable qui harcèle une personne, lui rend la vie impossible en l'assommant de remarques dévalorisantes de manière répétée se rend coupable de harcèlement psychique. Il encourt une peine de prison ou une amende. Si le harcèlement pousse au suicide, il s'agit d'un crime.

Un actionnaire d'une compagnie qui utilise régulièrement le harcèlement pour licencier ses collaborateurs, si cette compagnie pousse ses collaborateurs au suicide de cette façon, il ne se rend coupable de rien. Il est considéré comme un homme respectable. Sa richesse est légitime.

Pourtant, ils font exactement la même chose et s'enrichissent exactement de la même façon.

Un justiciable qui empoisonne l'eau de son voisin, qui détruit son champ, qui vole sa terre, qui accumule les déchets chimiques ou radioactifs sur son terrain se rend coupable d'une violation de la propriété privée et d'un dol sévère. Il encourt une peine de prison ou une amende et doit, de toute façon, réparer le dol.

Un actionnaire d'une compagnie qui accapare les terres, les empoisonnent, déverse des déchets chimiques ou radioactifs dans les rivières ou sur les terres ne se rend coupable de rien. Il est considéré comme un homme respectable. Sa richesse est légitime.

Pourtant, ils font exactement la même chose et s'enrichissent exactement de la même façon.

Une personne qui en agresse une autre sans égard pour elle, qui lui parle de manière méprisante, qui lui intime d'ordre de ce qu'elle doit faire et comment sans égard pour elle est un rustre. Si cette personne profite d'une position dominante, il s'agit d'un abus de pouvoir. Elle encourt une peine de prison ou une amende.

Un actionnaire qui détient une compagnie qui rudoie ses employés, les traite de manière méprisante, leur intime l'ordre de ce qu'ils doivent faire sans égard pour eux est un propriétaire responsable, un "bon père de famille". La compagnie profite pourtant d'une position de pouvoir puisque les employés sont contraints de vendre leur force de travail. Il s'agit d'un abus de pouvoir. L'actionnaire est considéré comme un homme respectable. Sa richesse est légitime.

Pourtant, ils font exactement la même chose, s'enrichissent exactement de la même façon.

Et si on appliquait la justice?
Et si la propriété lucrative était un déni de justice?

L'emploi contre le travail

On me rappelle que nous avons énormément de travail à faire en tant que société. Sans prétendre à l'exhaustivité, nous devons

- convertir l'agriculture chimique en agriculture biologique
- isoler les bâtiments
- développer, entretenir et faire tourner des transports en commun fiables, réguliers, confortables; ces transports doivent desservir le territoire de manière fine
- construire des hôpitaux, les équiper
- pratiquer une médecine humaine, une médecine à l'écoute des patients, une médecine patiente qui favorise la santé public et non l'industrie pharmaceutique
- préparer la transition énergétique en anticipant la raréfaction du pétrole d'une part et, d'autre part, le réchauffement climatique
- soigner les personnes âgées, les malades, partager du temps avec elle
- ouvrir les enfants à la science, à l'apprentissage, à l'esprit critique
- inventer un projet commun
- rénover les infrastructures publiques
- éduquer à l'art
- développer nos pratiques de l'art sous toutes leurs formes


mais à cause de l'emploi ('jobs, jobs, jobs'), nous renonçons à mettre en oeuvre ces choses importantes, urgentes, nous sacrifions nos loisirs et notre vie de famille pour consacrer notre énergie, notre temps, notre jeunesse, notre maturité et demain notre vieillesse à des choses sans intérêt, à l'enrichissement d'actionnaires et au remboursement d'investisseurs.

Les bons comptes font les bons amis

On me charge de vous dire ...

Air France a fait près de 900 millions d'euros de bénéfice

Air France a licencié 2.900 personnes

Le chômage tue entre 10 et 20.000 personnes par an en France

mais rassurez-vous: le parti de la liquette veille, les syndicalistes sont interpellés à six heures du matin
Nous rappelons que les avions n'ont pas besoin d'actionnaires pour voler mais de technicien, de personnel de bord et de pilote

nous rappelons que la poste n'a pas besoin d'actionnaires (et de new public managment) mais de postiers, de postières qui par tous les temps distribuent le courrier jusque dans les coins les plus reculés

nous rappelons que les trains n'ont pas besoin de top managers pour fonctionner mais de mécaniciens et de conducteurs

nous rappelons que la recherche médicale n'a pas besoin d'actionnaires rapaces pour avancer mais de chercheurs, de chercheuses, qualifié(e)s, compétent(e)s et dévoué(e)s

nous rappelons que le travail n'a pas besoin d'employeur pour être effectué
nous rappelons que les producteurs n'ont pas besoin d'employeurs mais que les propriétaires lucratifs ont besoin d'employés par contre.

Nous appelons les producteurs à (se) rappeler (de) ces réalités simples.
Courage à toutes et à tous.

Ce qu'ils font à l'un(e) d'entre nous, ils nous le font à tous

La violence des liquettes

À l'occasion d'un article roboratif sur le "parti de la liquette", Frédéric Lordon nous résume la violence de l'emploi.

la terreur est le fond inaltérable du capitalisme tout court. Seul le recouvrement de la stabilisation macroéconomique (relative…) et de ce qui reste de protection sociale empêche de voir le roc ultime sur lequel le capital a assis son pouvoir : la prise d’otage de la vie nue. Réalité pourtant massive dont les salariés font la douloureuse expérience lorsque l’employeur, dont ils dépendent en tout et pour tout, décide qu’ils sont surnuméraires. En tout et pour tout en effet, puisque le salaire, condition de la vie matérielle dans ses nécessités les plus basales, est, par-là, la condition de la vie tout court, le prérequis à tout ce qui peut s’y construire. Et qu’en être privé c’est frôler l’anéantissement social – parfois y tomber carrément.
Comme de juste, la menace qui fait tout le pouvoir du capital et de ses hommes, menace du renvoi des individus ordinaires au néant, cette menace n’a pas même besoin d’être proférée pour être opératoire. Quoi qu’en aient les recouvrements combinés de la logomachie managériale, de l’idéologie économiciste et de la propagande médiatique, le fond de chantage qui, en dernière analyse, donne toute sa force au rapport d’enrôlement salarial est, sinon constamment présent à l’esprit de tous, du moins prêt à resurgir au moindre conflit, même le plus local, le plus « interpersonnel », où se fait connaître dans toute son évidence la différence hiérarchique du supérieur et du subordonné – et où l’on voit lequel « tient » l’autre et par quoi : un simple geste de la tête qui lui montre la porte.
Sources:

Le coût

À l'occasion de la tragique crise dite des "migrants" dans le sabir médiatique , nous avons le plaisir d'apprendre que lesdits "migrants" ne sont pas des coûts mais des investissements.

C'est tout à fait exact puisque ce sont des êtres humains qui participent pleinement à l'économie.

Mais alors, pourquoi les auteurs de ces discours de solidarité ont parlé depuis plus de trente ans de l'ensemble des travailleurs, de l'ensemble des producteurs en emploi ou non comme des "coûts"? Pourquoi ont-ils qualifié le travail lui-même, les êtres humains, les crèches, les écoles, les universités, les transports en commun, de "coûts"?

De notre point de vue, ni les producteurs ni les services publiques ne sont des coûts (qu'ils soient immigrés ou non d'ailleurs n'y change absolument rien).
Comme on aime bien rendre service, on vous a trouvé les "coûts" dans le fonctionnement de l'économie, les acteurs économiques qui, du fait de leur rôle, menacent nos matières premières, obèrent notre santé et nous surchargent de travail quand ils ne nous condamnent pas à la mort sociale:

1. Les employeurs ne servent à rien et empoisonnent et le travail et la production

2. Les investisseurs empêchent le travail utile et forcent la production nuisible

3. Les institutions étatiques ou para-étatiques, les syndicats ou associations qui appuient les employeurs et les investisseurs en promouvant la logique de l'emploi

4. Les médias et les institutions culturelles qui asseyent la logique délétère de l'emploi par leur discours ou par la façon dont ils cadrent les problèmes.
 Voilà pour les "coûts". Quant à l'humain, il ne peut être un coût pour l'économie puisque il en est la finalité.

Le 'bore-out"

Cet article est disponible en PDF ici 

L'emploi, c'est l'épuisement faute de temps de repos, d'espace pour la vie personnelle. C'est aussi la surqualification, la débilitation du travailleur par des tâches inintéressantes.

La nécessité de faire du profit pour des actionnaires amène aussi à mettre les employés dans des placards plus ou moins cossus, plus ou moins absurdes.
L'emploi s'oppose directement au travail comme humanisation du monde, comme défi, comme manière de devenir, comme rencontre, comme créativité (mais les actionnaires touchent leurs dividendes, donc).

Un blogueur, un inspecteur du travail, explique ce qu'est le syndrome du 'bore out', de l'ennui profond ici, sur le "Blog d'un inspecteur du travail".

Extraits

Il s’agit du bore-out, autrement dit, de l’ennui au travail.
Ce terme provient du verbe anglais « to bore » (s’ennuyer); il désigne l’abattement dont souffriraient, à ce jour, 32% de salariés européens, notamment dans le secteur tertiaire et la fonction publique.
Une « maladie » qui pourrait faire sourire dans un pays où plus de 10% de la population active est au chômage. Et pourtant…

Cette pathologie, conceptualisée en 2007 par Peter Werder et Philippe Rothlin au sein de leur ouvrage « Diagnosis Boreout », serait, elle aussi, – et comme le burn-out – vectrice de fatigue, d’anxiété, de troubles du sommeil, de perte d’estime de soi et de dépression.
« Il s’agit d’un manque de tâches captivantes et exigeantes, sur le plan qualitatif et/ou quantitatif au travers desquelles l’identification au travail et à l’entreprise se perd.
Le travail quotidien devient alors un «long moment » difficile à supporter et frustrant ».
Peter Werder souligne que « Quelqu’un ayant un syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui veut travailler mais ne peut pas, et donc souffre. »
BE2
Les symptômes qui caractérisent ce syndrome sont : l’ennui, l’absence de défi, l’insuffisance de sollicitations professionnelles ainsi que le désintérêt.
Le travail n’a alors plus de sens.
Les auteurs indiquent que, si vous répondez de manière affirmative à au moins 4 questions parmi celles-ci, vous souffrez certainement de bore-out où êtes en phase d’y succomber :
  • Au travail, passez-vous du temps à des occupations personnelles ?
  • Etes-vous sous-investi ou vous ennuyez-vous ?
  • Vous arrive-t-il de faire semblant de travailler alors que vous n’avez rien à faire ?
  • Etes-vous fatigué le soir alors que votre journée n’a pas été stressante ?
  • Etes-vous malheureux dans votre travail ?
  • Trouvez-vous que votre travail n’a pas de sens ?
  • Pourriez-vous finir votre travail plus vite que vous ne le faites ?
  • Avez-vous peu ou pas d’intérêt pour votre travail ?

Le bore-out n’a rien à voir avec la paresse mais prive le salarié de la reconnaissance dont il a besoin afin de s’épanouir dans son activité.
L’empêchement à utiliser son intelligence créatrice est une source réelle de souffrance au travail.
Au-delà de la perte de l’estime de soi, il peut déboucher sur une crise identitaire.
La différence entre le burn-out et le bore-out est un sentiment de honte.

(...)

Les raisons au sein du quotidien de travail 
Certains contextes de travail peuvent favoriser l’apparition du bore-out :
L’absence de travail
Les commandes sont en forte diminution au sein de l’entreprise et le rythme de travail ralentit.
Le salarié ne vient plus sur son lieu de travail que pour compter les heures qui le séparent de celle à laquelle il pourra rentrer chez lui.
Des tâches ennuyeuses ou lassantes
Certains métiers tels que vigile ou hôte d’accueil sont parfois difficiles à assumer compte-tenu des journées peu rythmées et des tâches répétitives à accomplir.
Au sein d’autres professions, les travaux nobles sont accaparés par quelques-uns alors que les tâches fastidieuses et sans signification sont laissées aux autres.
La surqualification
Un salarié qui occupe une fonction qui ne correspond pas à ses compétences termine ses dossiers en peu de temps et n’est pas assez stimulé.
Il se lasse alors d’un travail répétitif sans aucun challenge à relever.
L’isolement, la mise au placard, le manque de reconnaissance
Ce sont toutes les situations où un salarié se sent inutile.
L’isolement survient lorsque les contacts avec la hiérarchie ou les collègues disparaissent.
La mise au placard concerne souvent un cadre en fin de carrière à qui l’on fait comprendre qu’il serait bien qu’il quitte la société en ne lui confiant plus aucune mission.
Ce type de situation peut être assimilé à une forme de harcèlement par le vide.