Emploi et dissonnance cognitive


Témoignage de l'après emploi dans Sortir de l'emploi. Extrait

"Quand j'ai pris la décision de m'organiser pour quitter le monde du travail, je l'ai mal vécu. Les craintes, la solitude, et la culpabilité m'ont accompagné durant de longues semaines. J'ai alors cherché du soutien dans mon entourage, notamment auprès de personnes ayant souffert du travail.

A ma surprise, ce sont justement les personnes qui ont le plus trinqué au travail, qui ont été les plus critiques envers ma décision. J'ai eu du mal à le comprendre, et à l'accepter.

Certaines souffraient des maladies dues à leur travail, ont connu le harcèlement, le stress, la solitude, l'ennui, et autres plaies, pendant parfois des décennies. Elles m'ont dit que le travail rend libre, que c'est par lui qu'on participe à faire progresser la société. C'est grâce au travail qu'on s'épanouit, et qu'on se socialise. Comment peut-il exister dans l'esprit de ces personnes un tel écart entre leur vécu réel, et leurs propos idéalisés du travail?"
Ceci renvoie à la différence entre le travail et l'emploi. Le travail recouvre aussi bien les aspects concrets de la tâche, le rapport dynamique à l'environnement effectivement constitutif d'un psychisme et la cristallisation de la violence sociale dans le travail, le travail abstrait.

Ces deux formes de travail sont articulées de manière spécifique dans la convention capitaliste de l'emploi. C'est cette articulation, c'est ce mode d'organisation du travail abstrait et du travail concret qui pose problème en terme de coûts humains, d'efficacité et de dégâts écologiques.