La personnalisation du salaire est un piège

Un ami nous envoie la preuve par l'absurde de la chose.
Le gouverneur de la Banque Nationale Belge affirme:
 
"Quand vous êtes au chômage, vous vous constituez malgré tout des droits pour la pension mais vous ne cotisez pas au système."

Cette déclaration prouve une confusion intéressante à comprendre. Pour le banquier, la sécurité sociale constitue un type d'assurance individuelle dont les prestations devraient être liées au 'mérite' du travailleur, à la quantité d'argent versée à l'organisme d'assurance. La sécurité sociale, dans cette optique-là devient une grande boîte à chaussure dans laquelle ceux qui ont les moyens mettent de l'argent et ceux qui n'en ont pas ne jouissent pas d'assurance, tout simplement. Cette vision du monde implique que le travailleur 'récupère' ses cotisations privées plus tard - ce qui est une aberration fréquente chez les libéraux: la répartition distribue une richesse au moment où elle est produite, c'est la valeur ajoutée actuelle qui reconnaît une valeur produite par les retraités actuels. L'individualisation du salaire (le 'mérite') va de pair avec la confusion entre retraite par répartition et retraite par capitalisation. Elle va de pair avec la destruction de l'idée même de salaire social.
 
La cotisation n'est pas payée par le travailleur. Elle n'est pas non plus le fruit d'une ponction quelconque sur la valeur ajoutée. Elle est une création de valeur ajoutée, elle constitue une reconnaissance de la valeur créée hors emploi (par les chômeurs, les malades ou les retraités, voir ici).
 
Pour citer l'ami:
 
Voilà très précisément où mène cette assimilation permanente des "cotisations sociales", comme salaire partagé, à de la "para"fiscalité, à des ponctions sur les salaires, etc. etc. La cotisation n'est pas une contribution. Elle est un salaire collectif partagé via l'ONSS.
Pour info, il en va de même quand, au niveau de l'OCDE, on laisse englober les "cotisations sociales" dans la "charge fiscale globale" pour ensuite venir reprocher à la Belgique d'avoir une FISCALITE SUR LE TRAVAIL trop élevée, c'est-à-dire de TROP ponctionner ses salaires, alors que cette soi-disant PONCTION constitue du salaire.

Il importe en effet de distinguer l'impôt, une ponction qui coûte au salarié, du ressort de la redistribution de la cotisation, un salaire de plein droit.

La cotisation est un salaire socialisé, ce n'est pas un salaire 'gagné' par un individu, c'est une reconnaissance sociale de la valeur créée hors emploi.

À ce titre, elle a toutes nos faveurs - elle constitue en en-dehors, un après emploi, et, logiquement, devrait être défendue bec et ongle par les organisations de défense, de représentation des travailleurs.

Curieusement, ce n'est pas le cas. À nous producteurs, syndicalistes, syndiqués ou non, de les interpeller dans ce sens, de les interpeller sur l'impérative nécessité de sauver, d'augmenter, d'élargir les cotisations sociales, de socialiser le salaire.

Luc Coene s'attaque aux droits acquis
lalibre.be
Le gouverneur de la Banque nationale Luc Coene s'attaque mardi aux "droits acquis pour lesquels il n'y a pas vraiment de cont