Exploitation et mécanisation

Nous apprenons dans un article de l'Humanité (ici) que Foxconn, le sous-traitant des fabricants de bidules informatiques est en train de robotiser ses chaînes pour diminuer la masse salariale.

En soi, dans la logique du travail (et non de l'emploi), il faudrait se réjouir de la libération de centaines de milliers d'ouvriers astreints aux tâches les plus débiles, les plus pénibles et les plus répétitives qui soit. Mais nous ne sommes pas dans la logique du travail dans laquelle l'innovation libère, nous sommes dans la logique de l'emploi dans laquelle l'innovation condamne les ouvriers à la famine (et la machine économique à la crise). Explications.

Les salaires servent de base à la demande économique, à la dépense. Quand ils se contractent, la demande fléchit, ce qui contracte l'activité économique. La contraction de la production contraint les employeurs à licencier. Les chômeurs consomment encore moins et leurs anciens salaires manquent à la production économique qui se contracte encore ... ce qui contraint les employeurs à licencier, etc. C'est une crise de surproduction.

Ici, la mécanisation transforme la structure de la valeur ajoutée. Dans la valeur ajoutée, nous avons les dividendes, les salaires et les investissements. Quand la partie "investissement" augmente, quand la partie "amortissement des machines et acquisition de nouvelles machines" augmente relativement, la partie "salaire" diminue relativement. Le rapport entre la partie non salariale du capital, C, les outils de production, et les salaires, V, augmente. Ce rapport C/V est ce qu'on appelle la composition organique du capital.

Quand la composition organique du capital augmente, c'est le taux d'exploitation (V/C+Dividende) qui augmente. La diminution de la part des salaires et l'augmentation du taux d'exploitation entraînent - à production de biens et de services identiques - la production de valeur économique baisse.

Bref, les robots chinois tuent la demande de gadgets d'Apple que les ouvriers de l'Empire du Milieu achètent et, en plus, comme la production de machins ne demandera plus de main-d’œuvre, son prix diminuera du fait de la pression de la concurrence. Moins de prix, c'est une déflation, un effondrement économique.

La différence entre le travail et l'emploi est là: la technique est nécessairement une catastrophe économique du point de vue de l'emploi mais, du point de vue du travail, elle peut alléger le poids des tâches ingrates.