Un économiste critique l'activation et la guerre au salaire

Nous traduisons en français un article de Lars P. Syll paru en anglais sur son site (ici, en libre accès).

Traduction

Il y a deux ans, dans le cadre de son prix de sciences économiques de la banque de Suède en mémoire d'Alfred Nobel, Thomas Sargent, dans une interview à la télévision suédoise, déclarait que les travailleurs devaient se préparer à avoir de faibles indemnités de chômage pour être suffisamment incités à chercher de l'emploi.

unemployment

Cette vieille idée mercantiliste n'a que peu de fondements scientifiques. Cependant, il est symptomatique que les politiciens de droite et les économistes néo-classiques - comme Robert Lucas et Thomas Sargent - ressortent cette vieille recette miracle du chapeau. Comme leurs prédécesseurs des années 1920, ils suggèrent que la baisse des salaires est le bon moyen de renforcer la compétitivité d'économies déclinantes, de remettre l'économie en marche, de créer de l'emploi, de provoquer la croissance qui se débarrassera des dettes qui s'accumulent et d'équilibrer les budgets de l'État.

Mais recommander de résoudre les problèmes économiques en baissant les indemnités de chômage et en sabrant dans les salaires, dans ces temps difficiles, devrait être plutôt interprété comme un signe de la noyade de la confiance envers notre système économique. Les coupes de salaires et la baisse des prestations de chômage - bien sûr - ne sauvent ni la compétitivité ni l'emploi.

Ce dont nous avons besoin par dessus tout en ces temps, c'est de stimulation et de politiques économiques qui augmentent la demande

Au niveau sociétal, les coupes de salariales ne font qu'augmenter le risque de chômage de masse. Penser que l'on peut résoudre une crise économique de cette façon, c'est revenir à ces théories économiques et à ces politiques que John Maynard Keynes a démontées implacablement dès les années 1930. Ce sont des théories et des politiques qui ont mis des millions de personnes au chômage à travers le monde.

C'est une erreur atomique de penser qu'une politique de coupe générale des salaire va renforcer l'économie. Au contraire. Les effets cumulés des coupes salariales sont catastrophiques, comme l'a démontré Keynes. Ces coupes enclenchent un cercle vicieux de déflation qui fait augmenter les dettes des individus et des sociétés puisque la dette nominale n'est pas affectée par la diminution des prix et des salaires. Dans une économie qui s'est reposée de plus en plus sur des dettes croissantes et sur l'emprunt, [ces coupes] seraient la porte d'entrée d'une crise de la dette avec une chute des investissements, un chômage plus élevé. En bref, cette politique nous amène au seuil de la dépression.

Le danger pendant pour les économies aujourd'hui, c'est de ne pas trouver de consommateurs et d'investisseurs. La confiance et la demande effective doivent être rétablies. Le problème de nos économies n'est pas du côté de l'offre. la demande est - pour le dire crûment - simplement insuffisante pour faire tourner les roues de l'économie. Suggérer que la solution, c'est de baisser les salaires et les allocations de chômage, c'est prescrire des catastrophes encore plus graves.